Très touché par vos différents témoignages, je souhaitais réagir et y ajouter mon récit de vie. D'une part parce que découvrir vos vies plus ou moins similaire à la mienne c'est un peu rassurant, d'autre part, car je ressens aujourd'hui le besoin d'exprimer publiquement (...ou presque!) ce que je vis.
Voilà, je crois que j'y arrive... J'ai très peur mais j'y arrive! Cette fois, je vais y arriver... J'ai depuis quelque temps déjà changé d'état d'esprit, la question n'est plus partir ou rester, mais quand m'affirmer devant cet évidence, bi ou gay! Je me sens aujourd'hui plus gay qu'hétéro ou bi, aussi difficile à dire ou à écrire que se puisse être, c'est mon orgueil et ma virilité d'homme marié qui en prend un coup, tant pis. Il faut savoir un jour se retrouver, "Il est sans comparaison plus facile de faire ce qu'on est, que d'imiter ce qu'on est pas" (citation attribuée à Louis XIV, note du recopieur).
Marié et en couple depuis une dizaine d'année, des petits loups trop craquants que j'aime à en perdre la tête, et une femme exeptionnelle, que j'admire et que j'apprécie énormément. Cette femme, ma chérie, la seule de ma vie, je l'ai aimée comme un fou, je l'aime toujours mais différemment, elle m'a offert des moments extraodinaires mais je ne peux plus lui mentir. Je n'arrive plus à la regarder en face sans me sentir mal, tellement mal... Je sais qu'en prononcant ces derniers mots, je vais la décevoir, la peiner, mais ces mots et ce moment tragique sont indispensables pour qu'elle puisse rapidement, je lui souhaite se redresser et revivre autrement qu'à travers moi, ce mari que je ne suis plus. Ceci dit durant toute ses années je n'ai pas l'impression de lui avoir menti ou de l'avoir trahi, juste pas su dire et voir les choses, je n'ai pas changé, j'évolue... Bien malgré moi, il me serait infiniment plus simple de rester comme cela, avec cette vie que j'affectionne tant, mais elle ne me ressemble plus totalement. Sans le savoir je me suis menti et sans le vouloir je me suis trahi.
Je ne suis pas un mari exemplaire, distant et pas toujours d'excellente humeur, d'une patience des plus limitées, signe d'un profond mal être. Je suis aussi un papa exigeant, pas toujours présent là non plus, un travail passionnant qui me prends beaucoup de temps et dans lequel je me réfugie, un peu mal à l'aise vis-à-vis de ces deux amours qui ne demandent qu'à aimer entièrement. Mes enfants comprendront, avec le temps et réaliseront que je ne me sauve pas, que je ne les abandonnent pas et surtout que je les aime profondément mais que j'ai besoin de me retrouver complètement. Au fond de moi, depuis toujours je pose un regard différent à celui des mes amis sur le corps de l'homme, une attention particulière sans pourvoir y mettre de sentiment, juste de la curiosité, une envie, un désir... J'ai eu le plaisir de découvrir quelques hommes, juste pour le côté charnel de la relation, l'amour et la complicité étant jusque là pour moi inconcevables.
Tout a changé ce jour où j'ai rencontré sur un site peu prometteur ce garçon extraordinaire... De 5 ans mon aîné, gay et célibataire, résident à 50km de chez moi, nous sommes restés quelques mois à discuter sans pour autant se rencontrer, ce fut chose faite il y aura 1 an dans quelques jours. Et je suis tombé sous le charme de ce jeune homme sans prétention, simplement charmant, attentionné, gentil, et passionnant! Le temps nous a permis de nous rapprocher même si nos entrevues sont bien trop rares. Par délicatesse et surtout pour protéger ma famille il a toujours insisté pour que je prenne du recul et fasse attention à ne pas trop m'accrocher, de garder mes sentiments, impossible... Il est malheureusement habitué des relations éphémères qui n'aboutissent à rien, et esssaie de se protéger, par conséquent dévoile peu ses sentiments, il me répète sans cesse que la vie gay n'est pas gaie... Jamais il ne me demandera de le suivre et jamais il ne m'a promis d'être là le jour où je lui demanderai, c'est déroutant mais tellement plus sage ainsi...Ce grand jour approche, c'est une évidence, j'en ai très peur, lui aussi, j'aimerais énormément qu'il soit à mes côtés pour m'accompagner à ce moment délicat de ma vie. Il le sera, mais sera-t-il là après pour partager un quotidien, durant les mois et les années futures? Je ne peux pas lui demander, pas maintenant, il connait mon désir, mes attentes, je ne veux pas de réponse, par peur d'être déçu peut-être ou de ne pas avoir cette force. Affronter cette nouvelle réalité tout seul fait peur, mais je ne peux l'imposer à quelqu'un et encore moins le faire pour quelqu'un... C'est avant tout pour moi, même si les deux sont aujourd'hui intimement liés, c'est là-aussi une évidence.
J'ai révélé cette attirance pour l'homme à ma chérie dans l'été, elle me sentait perdu depuis des mois, elle ne savait rien, ne se doutais de rien. Ce soir-là fut une révélation je n'ai pas réussi à tout lui dire... presque rien en fait. Simplement et ce n'est pas évident que suite à une perte douloureuse qui m'a complètement déstabilisé, je me sentais paumé, et que j'étais attiré par les hommes tout en l'aimant, j'avais également rencontré un ami qui était devenu par la force des choses bien plus! ... Surprise et stupéfaite, elle a beaucoup pleuré, moi aussi, enlassé l'un à l'autre à la recherche du réconfort de l'autre. Son inquiétude sur le moment fut que je la quitte, la question n'était pour moi pas ici. Elle est venue par la suite. Depuis elle est dans le doute, j'ai essayé de me reprendre un peu, mais la situation n'est pas éternelle, je suis au bout de ce long cheminement. Elle se pose des questions et me pose des questions, je chemine doucement, cherchant ce moment juste s'il existe et surtout les mots qui la blesseront le moins.
Je me suis attardé en parallèle sur le site femmes d'homo, car je ne sais pas aujourd'hui ou me situer. Fais-je plus de mal à mon épouse en restant malgré lui avoir avoué mon attirance masculine ou lui en ferais-je moins en partant tout en sachant que je l'aime mais pour vivre la Vie qui me ressemble, celle qui je pense est la mienne...Faut-il souffrir pour aimer, ou aimer pour souffrir? Concrètement on sait ce qu'on perd...!
"La quiétude, c'est le bien de ceux qui ont à jamais choisi une part de leur destin et rejeté l'autre..." écrivait Colette... Joie, bonheur et tranquilité à ceux qui ont cette force et cette audace, je n'en ai pas encore le courage, peut être que... Il faut prendre le temps, je ne crois pas que celui du choix soit venu, même si je pense qu'il deviendra une évidence.
Je tiens pour finir à remercier Olivier pour ce poème superbe que j'ai pris plaisir à lire et relire, cette écriture tellement vraie dans laquelle je me suis refleté m'a poussé à déposer ici ma contribution.
"Je suis seul le regard dans le vide, sans envie, sans besoin, juste là comme ça, je me sens bien..."
Merci à vous... et bonne suite! Vivez tout!!!
Moi...